Max Relouzat, le militant quimpérois, Chevalier dans l’Ordre national du Mérite

Max Relouzat, 76 ans, Martiniquais, Quimpérois, distingué de l’Ordre national du Mérite pour une vie d’engagements. (Le Télégramme/Ronan Larvor)

Chevalier dans l’Ordre national du Mérite : Max Relouzat s’interroge en cette fin d’année sur les motifs de la distinction. Son engagement politique, syndical, associatif, contre le racisme, pour la mémoire de l’esclavage, pour ses Antilles natales, pour l’égalité ?

« Cette distinction m’a redonné la pêche ». Max Relouzat ne le cache pas, il avait besoin d’un remontant en cette période sombre. Ce n’est pas sur son sort que se penche le Quimpérois. C’est le militant qui aurait pu baisser les bras à bientôt 77 ans. « Oui, je suis inquiet, quand je vois tous ces morts en Méditerranée. Quel échec des indépendances, de la décolonisation ! ».

Les deux courriers reçus en novembre ont agi « comme un coup de pied aux fesses ». Pas question d’arrêter. Il faut dire que les signataires sont prestigieux. « J’ai le très grand plaisir de vous annoncer que j’ai décidé de vous nommer au grade de Chevalier dans l’Ordre national du Mérite. Cette prestigieuse distinction, que j’ai tenu à vous décerner sur mon contingent personnel de croix, récompense votre engagement au service de la France », écrit Emmanuel Macron. Le second courrier arrivé quelques jours plus tard est un courrier de félicitations de Jean Castex.

« Je ne sais pas d’où vient cette distinction », s’interroge Max qui rembobine 56 années d’engagements.

La Martinique et la Bretagne

À Quimper où il est arrivé en 1974, le natif de la Martinique est bien connu. « J’ai toujours eu un lien incroyable avec la Bretagne. Les premiers petits blancs que j’ai vus étaient curés, souvent Bretons. Il y a eu le marchand de sandales plastique de mon enfance, également Breton. Quand je suis arrivé en France, j’ai adhéré au parti communiste à la fin des années 1960 à Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine) grâce à un homme appelé le Stal. Je croyais que c’était son nom. Un jour où je suis allé chez lui, j’ai demandé où habitait Monsieur Le Stal. En fait, il s’appelait Caradec. C’était un Breton. Il avait sur son bras tatoué un numéro de déportation ». Il y a enfin Denise, l’épouse, dont les parents sont de Loctudy et Goulien. L’homme aux deux identités est mûr pour embrasser toutes les causes humanistes.

« Il faut arrêter d’infantiliser les Ultramarins »

L’histoire pourrait commencer en 1955 en Martinique, quand il a 10 ans. « J’avais dit à une enseignante que nos ancêtres n’étaient pas les Gaulois. Elle a dit à ma mère qu’elle pouvait me sortir de l’école car je ne ferai rien de bon dans la vie. Elle m’avait même mis un bonnet d’âne ». Le parcours est ensuite celui des ados antillais : un départ en métropole pour le service militaire en 1965, puis une prise en charge par le Bureau des migrations des départements d’outre-mer. En foyer dans la région parisienne, il est orienté par hasard vers la cuisine. Ce sera son métier jusqu’à la retraite.

Le « Stal » a entretenu la fibre révoltée du jeune Martiniquais qui revient sur son île en 1969. Il y participe à la création de la CGT Santé, la Mutuelle nationale des hospitaliers. Parallèlement, il s’engage sur le projet politique pour une « autonomie démocratique et populaire ». « Nous voulions une autonomie inter-caribéenne, pour ne pas dépendre des produits de la France. À l’époque on voyait des bananes produites en Martinique, envoyées mûrir à Marseille et revenir aux Antilles ! Il faut arrêter d’infantiliser les peuples ultramarins ».

Un nouveau projet

En 1974, il rentre à Quimper en famille. C’est ici désormais qu’il va faire bouger la société : création de l’association des travailleurs antillais, d’une union Santé CGT, de la Maison des associations, d’une association antiraciste. Le militant s’engage pour Haïti, le Rwanda. C’est en 1998 que naît l’idée d’un mémorial pour l’esclavage qui a force de persévérance se concrétisera à Brest en 2015 avec la statue de Marc Morvan.

Aujourd’hui, Max, requinqué, évoque son nouveau projet : « Je pense à une carte assurance alimentaire, résume-t-il. Le projet serait créé en synergie avec l’État, les collectivités, les associations comme le Secours Populaire, le Secours Catholique, les Restos du Cœur, etc. Il s’agit de créer un système où les plus démunis auraient une carte de 150 € par semaine pour acheter des produits alimentaires. Je lance un appel à tous ceux, par exemple des étudiants, qui veulent réfléchir à la faisabilité de cette opération qui permettra aux gens de retrouver une dignité, sans être infantilisés ».

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